Mythe ou histoire ?

La Bible comporte des genres littéraires très variés, que ce soit dans le Nouveau comme dans l‘Ancien Testament. Cela va de la poésie (comme le Cantique des cantiques par ex.) aux textes législatifs (le livre du Lévitique en est pratiquement exclusivement composé); en passant par les narrations historiques (les Actes des Apôtres), les textes apocalyptiques (comme le livre de l’Apocalypse), les textes liturgiques (comme les Psaumes) ainsi que des mythes. La présence de mythes dans la Bible indique-t-elle qu’elle ne dit pas la vérité ?

Une opposition ?

Le langage courant oppose souvent mythe et histoire. Le mythe serait un récit qui relèverait d’une mentalité primitive. Il s’oppose à l’histoire qui serait la narration objective de faits passés. On aurait donc d’un coté des récits inventés, irrationnels et de l’autre des faits avérés. D’un coté une invention, de l’autre la vérité.

Cette opposition conduit certains croyants à refuser que la Bible puisse contenir des mythes, puisque cette dernière énonce la vérité sur Dieu! Cette attitude conduit dans une impasse puisqu’elle a pour conséquence de développer une course vaine à la preuve historique, souvent doublée d’un renoncement à la raison.

Qu’est ce qu’un mythe ?

Aujourd’hui, les savants qui étudient les textes bibliques, mais aussi les autres grands textes fondateurs de civilisation, n’opposent pas mythe et vérité. Pour eux, le mythe est un récit composé qui n’est en rien « primitif ». Il raconte une histoire dont l’objectif est de permettre à l’être humain de se situer dans le monde. Le mythe a une fonction étiologique, c’est-à-dire qu’il cherche à donner à comprendre le sens de telle ou telle situation humaine. Mais au delà de la simple explication, il entend montrer comment l’humain peut ou doit se comporter dans cette situation.

Selon le philosophe Paul Ricoeur, le mythe est un langage symbolique pour dire l’indicible. Il relève de la métaphore. Le mythe exprime l’engagement de l’être humain dans la construction idéale de son monde. La science décrit, le mythe engage.

Mythe et histoire

On le voit, mythe et histoire ne s’opposent pas forcément. L’histoire, en tant que science rationnelle, obéit aux règles de toute science. Elle se veut descriptive et objective. Le mythe, en tant que construction littéraire, se veut une source d’inspiration pour l’engagement de l’humain dans son univers.

D’ailleurs la frontière entre histoire et mythe est parfois ténue. La distinction entre les deux est née au XVIIIème et XIXème siècle dans la continuité des Lumières. Les textes antérieurs à cette période (comme les textes bibliques par exemple) ne la connaissent pas. C’est ainsi qu’il est parfois difficile de dire si l’histoire de David ou de Moïse relève du mythe ou de l’histoire. Sans doute, un peu des deux.

Un exemple où mythe et histoire se confondent

Il arrive même qu’un événement historique prenne une dimension mythique. Regardez par exemple la figure de Vercingétorix dans l’histoire de France. Il s’agit indéniablement d’une figure historique que nous pouvons décrire à l’aide de sources objectives (le principale étant: Les commentaires sur la Guerre de Gaules de Jules César). Mais cette figure remplir aussi un rôle de mythe fondateur dans la France du XIXème siècle ! Les Français se reconnaissent dans cette figure et puisent en elle un certain nombre de traits de caractères (l’attachement à la liberté, la détermination, un destin national,…) qui vont leur permettre de situer dans l’Europe des nations de l’époque.

Véracité ou vérité ?

En fait, textes historiques ou textes mythiques cherchent tous à rendre compte d’une forme de vérité. D’un coté une vérité rationnelle et objective, de l’autre une vérité existentielle et engageante. Ce n’est pas parce qu’un texte biblique n’exprime pas une vérité historique qu’il ne nous parle pas d’une vérité existentielle. La vérité d’un mythe ne se dissout pas dans sa vraisemblance.

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